ARPP : Michel Bonnet, vous avez été réélu à l’unanimité à la présidence du Conseil Paritaire de la Publicité, quelle est votre analyse des missions qui vous attendent ?
Michel Bonnet : Depuis quelques années, les « anti-pub totaux » sont de plus en plus nombreux, c’est du moins ce que l’on peut légitimement penser en entendant leurs voix ici ou là. Souvent, les arguments sont faibles et, à les écouter, il suffirait de faire disparaitre la publicité pour que tous les problèmes soient réglés : obésité, excès du consumérisme, surconsommation, pollution, pauvreté, et que sais-je encore…
C’est parce que je ne suis pas enclin à suivre de tels discours que je suis venu ici au Conseil paritaire de la publicité (CPP) : agir, le plus concrètement possible pour faire évoluer la publicité pour plus de respect du consommateur, de la santé des citoyens, des marques, de la planète… Faire évoluer et améliorer plutôt que d’attendre un coup de baguette magique qui règlerait tout !
Alors, oui, c’est un long combat et chaque année, chaque instant, il faut accepter de tout remettre sur la table de travail et d’échanger pour trouver une voie d’amélioration, un chemin de progrès… Souvent le doute est là et il faut trouver une solution jouable, acceptable, crédible…
Heureusement, les membres du CPP, représentatifs des différents milieux associatifs et professionnels, travaillent avec persévérance et obstination… C’est un honneur que de présider aux travaux de cette instance !
Cette année, ceux-ci ont été encore denses et complexes même si les avis n’ont pas été si nombreux. Mais, parfois, un avis nécessite beaucoup de travail, d’auditions et le compromis de l’accord n’est pas si simple à trouver !
Comme nous entamons un nouveau cycle avec plusieurs nouveaux membres, espérons que chacun trouve sa place pour travailler ensemble et que nous participions ainsi à l’amélioration et la régulation de la publicité en France !
ARPP : Madame Joly vous êtes la présidente fondatrice du Collectif National des Associations d’Obèses. Les actions du CNAO reposent sur 3 grands piliers :
- Faire reconnaître la maladie obésité comme une maladie chronique,
- Organiser des actions de prévention et de sensibilisation
- Contribuer à l’optimisation du parcours de soin d’un patient atteint de surpoids et/ou d’obésité.
Le CNAO est également signataire de la Charte « Alimentaire » depuis 2013 et porte ainsi les engagements volontaires pris par ces acteurs pour promouvoir des comportements favorables à la santé dans les programmes audiovisuels et les publicités.
Avant de devenir une des membres du CPP, vous connaissiez déjà cette instance pour avoir été auditionnée par ses membres dans le cadre de l’Avis qu’ils ont rendus en février 2021 pour faire évoluer une nouvelle fois la Recommandation de l’ARPP sur les comportements alimentaires.
Désormais, en tant que nouvelle membre du CPP et au regard de son champ de compétence, quelles sont vos attentes ?
Anne-Sophie Joly : Je connais et je soutiens les engagements essentiels pris par les professionnels pour encadrer le contenu des messages et promouvoir les bons comportements alimentaires dans la Recommandation de l’ARPP.
Néanmoins et au-delà du champ de compétences du Conseil Paritaire de la Publicité, qui permet des échanges constructifs entre les associations et les professionnels et l’expression des attentes de la société civile, il semble opportun de coconstruire autour d’un enjeu majeur aujourd’hui : une représentation plus juste de la société française, en particulier de sa diversité corporelle.
En tant que Présidente du Collectif National des Associations d’Obèses, la lutte contre la stigmatisation et les discriminations des personnes en situation d’obésité, qui représentent plus de 8,5 millions de nos concitoyens, est un combat qui me tient particulièrement à cœur. S’il n’est heureusement plus possible, grâce à la Recommandation de l’ARPP sur les comportements alimentaires, de stigmatiser les personnes en raison de leur corpulence, les personnes en surpoids ou en obésité restent sous-représentées dans la publicité.
Or, la publicité a une responsabilité sociétale et peut jouer un véritable rôle dans l’acceptation de la différence corporelle et participer à la construction d’une société plus inclusive, bienveillante et juste.
ARPP : En tant que vice-présidente du Conseil Paritaire de la Publicité réélue pour cette nouvelle mandature, quel message souhaitez-vous adresser aux membres du collège des professionnels que vous représentez au sein de cette instance ?
Laureline L’Honnen-Frossard : Je suis ravie du renouvellement de mon mandat pour l’Union des marques aux côtés du Président du CPP Michel Bonnet et remercie les membres du Conseil paritaire de la publicité pour leur confiance renouvelée.
L’Union des marques souhaite poursuivre pleinement son implication dans le dialogue avec les associations que permet cette instance, au même titre que les autres membres professionnels qui ont tous souhaité renouveler leur mandat signe d’un attachement particulier à ses travaux qui doit être souligné. Nous accueillons également cette année une nouvelle membre côté « professionnels » pour représenter l’Association des Agences-Conseils en Communication (AACC) avec la désignation de Caroline Fontaine qui en est la nouvelle Déléguée générale.
Le Conseil paritaire de la publicité est un espace particulier pour les professionnels. Unique en Europe, il permet de nouer un véritable dialogue, confiant et productif sur les enjeux et attentes des associations mis en perspectives avec ceux des professionnels sur un sujet donné. Le travail du CPP est en effet fondé depuis ses origines sur le dialogue et la concertation qui sont au cœur de tous les débats dans nos groupes de travail dédiés, puis en réunion plénière, ce qui permet aux membres des deux collèges – professionnels et associations – de se retrouver autour d’une voie qui se veut ambitieuse, réaliste et efficace. Dernier exemple en date, les travaux sur la publicité financière en 2023 qui ont abouti à un avis visant à la fois à l’évolution des trois Recommandations qui existaient déjà et à la création d’une nouvelle dédiée aux crypto-actifs. L’implication des membres dans le groupe de travail lors des auditions des parties prenantes et lors des Plénières ainsi que leur force de proposition ont permis d’orienter la rédaction de ces Recommandations qui contiennent toutes désormais des règles prenant en compte les enjeux portés par les associations de façon encore plus opérationnelle et pédagogique.
Malgré des délais souvent restreints, le CPP est toujours parvenu à trouver le rythme et l’implication nécessaires sur des dossiers aussi complexes et sensibles tels que celui des produits financiers ou encore sur le développement durable, sur les comportements alimentaires ou la publicité en faveur des jeux d’argent. J’ai confiance dans le fait que le collège professionnel saura également se mobiliser en 2024 avec le collège des associations pour de nouvelles discussions.
ARPP : Monsieur Tirot vous êtes chargé de mission pour le secteur consommation et économie à la Confédération syndicale des familles (CSF).
Les éléments forts de la CSF sont :
- L’ancrage des actions dans une démarche d’éducation populaire,
- La promotion collective des individus,
- L’autonomie vis-à-vis des organisations professionnelles, syndicales et politiques,
- Le choix de la laïcité comme principe fort.
Comment concevez-vous votre travail au sein du CPP, quelles sont les questions qui vous apparaissent prioritaires ?
Antoine Tirot : En tant que responsable du secteur consommation/économie/environnement à la Confédération Syndicale des Familles (La CSF), je conçois mon travail au sein du CPP (Collège des Associations agréées de Défense des Consommateurs) comme une opportunité d’agir de manière efficace et constructive pour défendre les droits et les attentes des consommateurs, conformément aux valeurs et principes de la CSF.
Les questions prioritaires qui me semblent nécessiter une attention particulière sont les suivantes :
Le greenwashing :
Je considère qu’il est crucial de lutter contre les pratiques trompeuses des entreprises qui prétendent à tort être respectueuses de l’environnement afin de mieux informer et protéger les consommateurs.
Les arnaques aux crypto-actifs :
Avec la montée en puissance des crypto-monnaies, il est impératif de sensibiliser les consommateurs aux risques associés et de promouvoir une régulation adéquate pour éviter les fraudes.
L’affichage sauvage :
Cette pratique nuit à l’environnement et à l’esthétique des espaces publics. Je suis favorable à des mesures strictes pour dissuader cette pratique et protéger les paysages urbains.
La régulation des progrès dans la publicité :
Tout en respectant la liberté d’expression commerciale, il est essentiel de veiller à ce que la publicité soit transparente, honnête et respectueuse des valeurs de la société.